Le préfet de police de Paris crée la polémique en liant hospitalisation et non-confinement

Des politiques et des médecins ont demandé sa démission, malgré ses excuses : le préfet de police de Paris a une nouvelle fois créé la polémique vendredi, cette fois en établissant un lien entre l’hospitalisation des patients et le non-respect du confinement décrété face au coronavirus.

« Ceux qui sont aujourd’hui hospitalisés, ceux qu’on trouve dans les réanimations, ce sont ceux qui, au début du confinement, ne l’ont pas respecté, c’est très simple, il y a une corrélation très simple », a déclaré le préfet de police Didier Lallement vendredi matin lors d’un point presse sur un contrôle routier pour dissuader les départs en vacances.

Vite reprise, la déclaration a fait réagir sur les réseaux sociaux. Trois heures après avoir prononcé ces mots et sur demande du ministre de l’Intérieur Christophe Castaner, qui l’a appelé, selon une source proche du dossier, le préfet présentait ses excuses, via un communiqué.

Didier Lallement « regrette les propos qu’il a tenus ce matin (…) et tient à les rectifier », indique le communiqué de la préfecture de police.

« L’intention n’était pas d’établir un lien direct entre le non-respect des consignes sanitaires et la présence de malades en réanimation », mais de « de rappeler la nécessité d’une stricte application du confinement », ajoute-t-il.

« Ce propos du préfet de police est inexact. Ce qui est vrai, c’est que le bon respect du confinement est un enjeu sanitaire majeur », a-t-on vite réagi dans l’entourage de Christophe Castaner.

Dans l’après-midi, le préfet, revenant à un « message d’unité, de solidarité », s’est de nouveau excusé, face caméra cette fois.

« Sur le fond, cela est faux mais au-delà de l’inexactitude, c’est une erreur et je la regrette à plusieurs titres », a-t-il dit en présentant de nouveau « ses excuses ».

« Je regrette d’avoir tenu ces propos et je comprends les réactions qu’ils ont suscités », a-t-il souligné.

« Pas du même camp » –

Des excuses qui ont été entendues par Pierre Carli, directeur médical du Samu de Paris. « Tout le monde travaille dans des circonstances assez exceptionnelles, on peut comprendre que parfois les propos ne soient pas adaptés pendant quelques instants », a-t-il dit.

Plus tôt, le Pr Frédéric Adnet, chef des urgences de l’hôpital Avicenne et du Samu de Seine-Saint-Denis avait demandé la démission du préfet, sur BFMTV : « Après des propos comme ça, il ne peut faire qu’une chose, il ne peut que démissionner ».

« C’est scandaleux. Insulter, traiter des malades en danger de mort de délinquants, c’est un véritable scandale. Il faudra dire à M. le préfet qu’il y a des soignants en réanimation », a-t-il dit.

Le président de l’Association des médecins urgentistes (AMUF) Patrick Pelloux, a qualifié les propos du préfet de « totalement faux ». « C’est un mensonge. Dont acte sur le fait qu’il a rectifié », a-t-il dit, appelant à « l’union en temps de guerre ».

Plusieurs responsables politiques ont aussi rapidement condamné « l’arrogance » ou les « insanités » des déclarations du préfet.

« En plus de méthodes très contestables et contestées, le préfet Lallement sort régulièrement de son devoir de réserve. Combien de temps encore? », s’est interrogé le député LREM Aurélien Taché sur Twitter.

Le chef de file de La France insoumise Jean-Luc Mélenchon, qui avait déjà accusé Didier Lallement d’avoir des « méthodes de psychopathe », a vu dans le préfet la « face grimaçante du régime », pour qui : « Ceux qui sont malades ou qui sont morts l’ont bien cherché ». La députée Clémentine Autain a affirmé que « l’exigence de sa démission, il l’a bien cherchée ».

Le premier secrétaire du PS Olivier Faure a estimé sur BFMTV que « ce préfet a décidément dépassé tous les seuils de tolérance possibles. Il n’est à l’évidence pas à sa place ».

« Il y a, en réanimation, des policiers et des personnels soignants sans protection adéquate, des caissières, des personnes âgées en Ehpad. Ces propos totalement stupides sont de surcroît d’une froideur et d’une méchanceté qui donnent la nausée », a affirmé la présidente du Rassemblement national Marine Le Pen.

Connu pour assumer son impopularité, le préfet avait déjà créé la polémique en lançant, en novembre, à une militante « gilet jaune » croisée dans la rue au lendemain d’une manifestation mouvementée: « Nous ne sommes pas du même camp, madame ! ».


Le préfet de police Didier Lallement en visite aux forces de police contrôlant l’accès à la Gare de Lyon à Paris, le 3 avril 2020 – AFP / Ludovic MARIN

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